Parrainer, former, accompagner les plus jeunes par les plus expérimentés a toujours fait partie du fonctionnement traditionnel de l’entreprise. Aujourd’hui, ce genre de dispositif revêt un tout nouvel objectif en se faisant 100% féminin….Explications
Les femmes n’occupent aujourd’hui que 25 % des postes de top management en France. L’étude annuelle « Women in Business », menée par Grant Thornton International, ne fait que confirmer que le chemin vers l’égalité des sexes devant le travail est encore long et sinueux… Les « pionnières » ont dû généralement enfoncer les différentes portes dressées sur leur route par un environnement à forte dominante masculine. Alors, pour une plus grande équité aujourd’hui, les femmes s’organisent. Et se serrent les coudes.
« Le mentoring, c’est une personne avec beaucoup d’expérience dans les affaires qui en aide une autre, qui a autant de talent, mais qui est plus jeune (au moins dans son parcours). Elle lui apporte de la vision, de la confiance en soi et du réseau, définit Martine Liautaud, fondatrice d’une banque d’affaire et mentor de la première heure. Un mentor, c’est une oreille, une épaule, une force de proposition. »
Le vieux mythe de la jalousie féminine
Car si le mentoring (ou parrainage) mixte est institutionnalisé depuis longtemps dans les grands groupes, sa version exclusivement féminine a aujourd’hui le vent en poupe. Et cette tendance est d’abord l’occasion de combattre un vieux fantasme. Au combat de coqs, il n’existe aucun équivalent de bataille de poules ! Pour Agathe Bousquet, PDG d’Havas Paris, « jouer les mentors, c’est une manière de tordre le cou à l’idée reçue selon laquelle les femmes ne sont pas solidaires entre elles. Au contraire ! ». Mercedes Erra, fondatrice de BETC, abonde : « Avant, on pensait que les femmes se battaient individuellement. Nous sommes à une époque beaucoup plus ouverte, jamais je ne serais jalouse d’une jeune fille. Je suis tellement contente quand une femme avance ! »
Les principales qualités du mentor résident dans la capacité à créer les conditions pour que le mentee se réalise pleinement. Cela passe par la faculté à discerner le potentiel du mentee, par son écoute et son intérêt constant et une posture d’exemple qui créent les conditions du développement de la confiance. Car la confiance est la condition sine qua non pour faire voler en éclats le plafond de verre. C’est ce que prêche Jessica Delpirou, directrice de Meetic France :« Je veux leur donner la confiance d’aborder les choses de façon aussi audacieuse que peuvent le faire les hommes en entreprise. Il ne faut pas qu’elles se mettent de barrières ».
Du geste individuel vers le combat collectif
Il faut parfois quelques clés pour démystifier le monde de l’entreprise régi par des codes, des réseaux ou des usages essentiellement masculins, pour ne pas dire machistes. Ce pied à l’étrier doit leur permettre de s’affirmer, d’aiguiser leurs ambitions et de ne pas avoir peur de contester l’ordre établi… Jusqu’aux sommets : « Le pouvoir ne se donne pas comme une note, il se conquiert et se prend, c’est tout ! », tonne Youmna Ovazza, mentor du programme EPWN (Professional Women’s Network).
Si les principaux sujets abordés sont professionnels, le mentoring est selon Anne Boussarie, directrice générale de Getty Images France, avant tout une relation humaine basée sur l’échange et le partage : « Ça m’apporte beaucoup, quand l’humain est au cœur de la relation, c’est toujours une richesse (…) Ma plus belle fierté en tant que manager, c’est de permettre à des femmes d’évoluer ». L’avancée d’une femme est aussi une avancée pour toutes les femmes.
Le mentoring repose sur des valeurs parfois rares en entreprise : l’empathie, la bienveillance, le bénévolat… Il n’y a pas d’autre intérêt en jeu que la transmission et la volonté de voir les autres s’élever, comme le confirme Anne-Marie Gabelica, mentor du programme Women Business Mentoring Initiative (WBMI) : « le mentoring se fonde sur un principe formidable, celui du partage et de la gratuité. Les mentors le font par générosité, leur seul intérêt, c’est le lien social (…) Il n’y a aucune ambiguïté. »
Au jeu du mentor mentoré !
Et ce ne sont d’ailleurs pas toujours les mentees qui en apprennent le plus sur eux dans cette expérience… « Il y a des femmes qui m’ont énormément appris. Le sentiment qui m’anime le plus souvent est l’admiration. Les femmes d’aujourd’hui sont formidables ! » (Clara Gaymard, cofondatrice du fond d’investissement Raise)
Martine Liautaud voit même dans ces programmes de mentoring un intérêt général pour l’avenir de la France : « Ce que nous, mentors, participons à construire, ce sont des bonnes entrepreneures, de bonnes dirigeantes, des femmes qui s’inscrivent dans une perspective durable de développement de leur entreprise pour l’économie du pays.»
Les programmes de mentoring féminins plébiscités par les entreprises
De nombreux groupes français ou internationaux ont investi sur la question en lançant leur propre programme ou en soutenant des organismes. Parmi eux : Woman@Dior, Women in Networking by Engie, Women Initiative Fundation, soutenue par BNP Paribas, Woman@Capgemini France. Et ce n’est qu’un début…